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13 avril 2010 2 13 /04 /avril /2010 10:14

L'acte gratuit ressemble à l'acte de dieu lorsqu'il créa le monde.

 

 

 

 

 

 

Les certitudes, quand elles se dressent sur le chemin de la connaissance, sont autant d'impasses sur lesquelles l'esprit bute et grâce auxquelles il risque de se fermer (ne serait-ce que momentanément).

Un fleuve ne doit jamais se laisser encombrer par ses bras morts. Tout au plus les certitudes permettent un temps à l'esprit de "souffler". Mais, s'il "souffle", s'il fait halte trop longtemps, il ne peut plus rebondir Le bras mort du fleuve s'est alors transformé en un marécage.

 

 

 

 

 

 

 

 

Une même chose, un même fait, un même phénomène ou un même problème peuvent s'aborder sous de nombreux différents angles d'approche.

Pourtant, dans des registres différents, seuls le yoga et les mathématiques nous ouvrent la porte de l'infini .

 

 

 

 

 

 

 

 

La France, pays bicéphale, paraît posséder deux consciences :

celle d'un vieux pays d'Europe, à la très forte identité, à l'âme plutôt conservatrice, aux tendances un peu "arrogantes" et fermées aux influences extérieures de dominant, d'ancien pays colonisateur, de contrée riche

et celle, à côté de cela, d'un pays qui fut marqué par l'idéal révolutionnaire universaliste, par les idées de "liberté-égalité-fraternité" et, par la suite, travaillé par une forte conscience de gauche, franc-maçonne, marxisante et anarchisante.

C'est peut-être ce qui gêne le plus en elle : comment parler à deux voix en une ? Comment faire, quand, si vous vous adressez à l'une, c'est l'autre qui se met à vous répondre, comme une sorte de double discordant ?

 

 

 

 

 

 

 

 

Le mode de vie postmoderne estompe les "identités nationales".

Spectacles médiatiques et possibilités de voyages accrues nous font prendre conscience du fait que, que nous vivions en France ou, par exemple, en Amérique, en Australie ou au Japon, nous vivons tous, à peu près, sur le même tempo, environnés d'autoroutes, de buildings et gratte-ciels, de rames de métro, de centres commerciaux et de galeries marchandes qui se ressemblent  tous et toutes.

En outre, nous avons tous plus ou moins les mêmes rêves aseptisés : confort, hygiène monomaniaque, pavillon en grande banlieue (le plus près possible de la campagne) et vie de bureau aux heures fixes, petite famille nucléaires fondées sur l'Amour (mais certainement pas à l'abri du divorce) ne dépassant pas les deux enfants, voiture, jogging, vacances pour "décompresser" le plus loin possible, sécurité et jouissance, goût du "grand frisson" mais de loin, par cinéma interposé. Lorsque nous regardons un feuilleton ou un téléfilm américain, les grandes maisons pourvues de vérandas et les feuillages colorés par l'été indien nous parlent presque autant, maintenant, que nos propres cadres de vie. Peut-être est-ce cela qui explique, en un sens (paradoxal), la rage à s'accrocher aux "exceptions" (la française, entre autres) et, plus grave, cette méfiance à l'égard de toute forme d'altérité nouvelle trop criante...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les concepts.

Où mènent-ils ?

Ne sont-il pas d'abord des membres de la famille des concepts ?

 

 

 

 

 

 

 

 

Le cerveau humain est-il complexe parce que le monde est complexe ? Est-il complexe pour répondre à la complexité du monde (comme un écho, en quelque sorte) ?

 

 

 

 

 

 

 

L'intelligence mathématique émerge avec l'esprit de l'Homme.

Peut-on penser que cette émergence soit une perche que dieu nous tend ?

 

 

 

 

 

 

 

La démarche de transmettre une connaissance couplée à celle de respecter la connaissance qu'on reçoit, voilà l'un des caractères les plus ancrés, les plus fondamentaux de la mentalité asiatique (du sous-continent indien jusqu'à l'Asie de l'Est et du Sud-Est).

C'est, en un sens, l'un des moteurs du "développement" asiatique.

 

 

 

 

 

 

 

Les cultures qui valorisent énormémént l'intelligence et l'acquisition de connaissances sont celles qui font avancer l'esprit humain.

 

 

 

 

 

 

 

L'humilité est une disposition d'esprit qui favorise la démarche de la connaissance.

 

 

 

 

 

 

La vanité est...vaine.

 

 

 

 

 

 

On devient 'reconnu"; et puis ? N'a-t-on pas un mouvement de recul ?

L'être "reconnu" et celui qui va disparaître, replonger dans le néant, ne restent-ils pas le même ?

 

 

 

 

 

 

 

La capacité de concentration et la motivation à connaître sont des préalables obligés à l'acquisition de connaissances.

 

 

 

 

 

 

 

Plus vous dépouillez votre pensée, plus le raisonnement a des chances de devenir plus fécond, plus libre.







Connaître ?

C'est à la fois une disposition d'esprit et une discipline.







Sans discipline exercée sur le mental (et donc sur le corps), pas de connaissance.

Après quoi l'engrangement des connaissances devient une sorte d'automatisme.







Quelque part, le corps est "mental", dans la même mesure que l'esprit est "physique".







Si l'Homme veut vivre le plus longtemps possible, c'est au nom de la vie de l'esprit.







Dans certains cas, accomplir, atteindre les buts qu'on s'était fixé, peut autant effrayer, perturber, coller le vertige que le fait d'échouer à accomplir.







Ce qui AURAIT PU SE FAIRE est quelquefois plus tentant que ce qui PEUT SE FAIRE.

Il y a là un possible manqué, à jamais inexploré, vierge, comme un foetus avorté que l'on regrette.

 

 

P. Laranco.

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12 avril 2010 1 12 /04 /avril /2010 12:35

TERRITOIRE DU POEME
( Fondé par Anne Stell * Animé par Christian Deudon )


Présente


« IMPROMPTU COULEUR FEMMES »
Avec
ELIANE BIEDERMANN, PATRICIA LARANCO
et
JEANINE SALESSE
***
( Lectures par Suzanne Le Magnen et Christian Deudon )
Le Vendredi 16 AVRIL 2010 à 15H30
***
A LA BRASSERIE « LE FRANCOIS COPPEE » ( 1er étage)
1, Boulevard du Montparnasse, Paris
Métro Duroc
CONSOMMATION : 6 Euros

******

 

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12 avril 2010 1 12 /04 /avril /2010 10:29

Claudine Bertrand et Suzanne Vanweddingen
  ont la joie de vous annoncer la parution du neuvième numéro de
 
 "Des Rails"
 Couleur Femme



  Ce numéro est disponible à la lecture et au téléchargement sur le site de la revue :
  http://desrails.free.fr

 

 

 

 


 
Des Rails, la revue de l’imaginaire ferroviaire
 
ISSN : 1776-0801
 Numéro #9 : "Couleur Femme", numéro dirigé par Claudine Bertrand
 10 avril 2010
 http://desrails.free.fr

 

 

 

 

 

Sources : Diane Descôteaux et Joël Conte.

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12 avril 2010 1 12 /04 /avril /2010 10:19

A bout de souffle.

 

Lointitude, de Patricia Laranco

(La Jointée Editeur, 2009, collection Les œuvres jointes, n° 7,

préface de Jean-Pierre Desthuilliers)

 

Lire de la poésie c’est pour moi avant tout sentir mon souffle coupé : si cela ne m’arrive pas, c’est que la poésie n’est pas là. Oui, je sais, c’est extrêmement subjectif ; mais questionnez-vous, quelque chose de similaire devait vous arriver, quelle que soit la formulation que vous donneriez à l’événement, et c’est alors que vous reconnaissez en votre for intérieur que vous aimez ce que vous étiez en train de lire. Sans aucune autre considération d’aucune sorte.

Dans ce sursaut une part cachée de notre âme se réveille, se lève, s’émerveille. Et il se trouve pour moi aujourd’hui que ce sont des voix de femmes poètes qui me font cet effet. Elles ont quelque chose à dire, à faire sentir, à faire vivre, qui me tient en haleine. En effroi même parfois. En quête toujours.

J’aimerais commencer par celle dont l’écriture est la plus proche de ma propre façon de faire de la poésie. Car le poète, pour moi, est quelqu’un qui fait, et se fait soi-même, et non quelqu’un qui parle : l’écriture est vie, la vie est écriture.

C’est un peu comme se jeter hors de son corps,

oui… comme d’accomplir, au dehors, le grand saut,

le plongeon qui vous arrache au balcon frileux

oui, c’est cela : cracher un mot de poésie. (Libération).

Il s’agit de Patricia Laranco.

Je la découvre, à travers son recueil Lointitude, avec un profond sentiment de reconnaissance, comme si je rentrais chez moi, dans une maison ancestrale, après un long périple de par le monde. Je rentre comme dans une grotte sombre mais pleine de merveilles. Une poésie dure, âpre, directe, comme la terre, l’eau, le vent, les flammes, la nuit, le vide.

On mettra à contribution la liberté

cet ébouriffement

qui nous fait penser que

la rugosité du pain est peut-être

roc,

sa dureté, ses sillons, ses crêtes

pierre, terre

le pain, posé sur la table, est reptilien

il ressemble, de loin, à un caméléon

pain, table se perdent en la pénombre éructée

tous deux boivent le silence brun, vertical

chut ne troublons pas leur respect ombilical

n’attentons pas à leur esprit cérémoniel (L’obstacle latent)

Une poésie des états fondateurs de l’humain : la démesure de la joie, l’angoisse du noir, la dilution du réel, la perte de soi, l’étrangeté au monde, l’éloignement du centre, la perte de la « proximité » originelle, et une déchirante écorchure quotidienne :

La peau

regarde et suit les murs

où les lambeaux d’affiches lui

parlent de sa propre faillite

la peau traverse les quartiers

hirsutes, métalliques qui

se taisent avec entêtement,

les murs

eux-mêmes pelés lui

arrachent

le peu qui lui reste.

Et le corps

hurle avec les loups. (La peau)

Mais aussi l’attirance du retour vers un néant nourricier qui nous ferait renaître, autrement.

Le sommeil… ou aller au plus simple, au plus beau,

au plus vrai de la pulsation qui fonde tout.

N’avoir plus en guise de conscience que ça :

l’obscurité tournée en dedans d’elle-même.

Savourer la plus profonde des intimités

avec ce moi si brut, si soustrait, si enfoui

cette goutte de tourbe, d’argile mouillée

si proche de la racine de l’univers. (Le sommeil) 

Les miroirs, les interrogations, les gestes, les nuages, les corps, les pluies, les roses, les crépuscules, les glaises, les paupières, les mots : autant de signes mal connus que le poète touche de ses mots comme de mains d’enfant avides de comprendre.

Erres

sur les tarmacs et dans les réduits,

n’accorde pas crédit

au rugueux intellect

mais bien plutôt à sa sœur : l’incrédulité

qui respire à mesure

que la rosée

pulse.

Des signes de matière et d’esprit parmi lesquels le poète vacille, se cherche, se fraie un chemin,

car il n’est pas de devoir si ce n’est celui

de balbutier, de tituber, de trébucher

sous une grosse lune bouffie

qui te toise. (Modestie)

Il évolue au milieu de nulle part, au milieu de tout, au milieu de rien, traversant le monde comme un dense tissu de broussailles enchevêtrés par une bourrasque cosmique, d’au-delà du temps et de l’espace.

Nous fîmes un jour corps avec.

C’était à l’époque sans air,

à l’époque d’eau sans pensée

puis nous fûmes crachés,

bannis. (La bourrasque)

Lointitude – titre du recueil – rime  avec solitude, et c’est l’état du poète : perdu, étranger au monde, « aspiré par l’exil », s’éloignant de tout, tout en se rapprochant du nœud des nœuds, le nœud de l’être, comme d’une île minuscule, invisible, au cœur de l’océan universel.

Là. Dans le silence central.

Le silence central de l’être,

le nœud d silence central

où les mots n’ont plus de poids (Dedans).

Et c’est là le paradoxe qui émerveille le lecteur : réduit à l’essentiel, presque dissout dans l’abstraction de ce dépouillement, de ce dépaysement total, le poète – « îlot d’absolue lointitude »  – se revendique comme étant avant tout, avant ses mots mêmes, un corps sensitif, s’infusant dans le réel, en prise directe avec la racine de toute sensation.

J’aime être au plus près de mon corps. De sa tiède

immobilité. Cette félicité, qui macère.

Cette épaisseur d’eau.

Qui respire. (Les gestes)

Solitude. Un cœur gros. Qui erre, en promeneur.

Qui se fond dans les parois abruptes des murs sales.

Qui avale, gobe gloutonnement les détails menus. Qui

S’encastre dans leur densité confondante. (Solitude)

Mais ce corps est un organe paradoxal dont les sensations perçoivent « la part d’absence » du réel (Hyperréalité) et rendent réel l’irréel.

Il suffit d’exister, quelquefois,

rien de plus

pour que se révèle, en soi, la part de néant,

la proximité avec le peu, le si peu,

l’humilité profonde

que corps et chair

recèlent. (Dilution)

Et alors éclate sur la peau du rien, tangente à l’abstrait, glissant sur la coquille de « l’intérieur, ce vide blanc / ce champ de neige abandonné  (…) cette alvéole qui se tient / aux aguets / hors toute souillure », la fascination des formes, métaphores éblouissantes de couleurs, de chaleur, de lumières, d’odeurs, de toucher et de son.

Puisqu’il faut te donner des noms

je t’appellerai

solitude,

je t’appellerai

lointitude

le jour m’a déposée au loin..(…)

J’étais sur la crête du soir

sur le balcon évanescent

où le vent flagellait les fleurs

chétives changées en toupies

le flux m’y avait déversée

plus bleu que le dos d’un dauphin

arqué sur son vaste plongeon

vers les débris de la mémoire.

Puisqu’il faut te donner des noms

je t’appellerai

sel du jour

crépitement de la candeur

passerelle

entre aube et couchant

le jour m’a déposée au loin

et je ne l’ai pas vu filer (…). (Lointitude II)

Ce qu’on reçoit en s’enfonçant dans cette lecture qui foisonne comme une forêt tropicale la nuit, ce n’est plus la beauté du monde, ou des mots, ou des êtres, c’est une beauté du néant fait fleur. Comme « des roses qui semblent / simplement rattachées / à la blancheur de l’air / et non plus / à leurs tiges » (Roses). Miracle rare qu’on ne vit que chez les grands, lorsque le poète s’absorbe au-delà de ses propres mots.

Des mots

qui vont plus loin que lui,

que tout ce qui se peut nommer.

Des mots qui tendent à

s’abolir

après l’avoir aboli, lui. (Lointitude I)

D’ailleurs les poèmes n’ont pas besoin de leurs auteurs, ils se dressent tous seuls, tels des serpents lovés en érection, maîtres et non maîtrisés : que sommes-nous, poètes, sinon leurs voix ?

Le poème lui est un animal rampant

jamais certain des chemins qu’il va emprunter

à lui aussi, on doit le respect,

      on le suit

à la merci des plus incroyables détours

le poème, en fait, n’a aucun besoin de nous

il louvoie et il bifurque sans réfléchir

sans se soucier des mots qu’il rencontrera

ou alors

qu’il refusera de rencontrer

Que sommes nous, lecteurs, sinon les témoins de la magie oraculaire opérée par le poème, qui de son exil au monde, fige le monde pour en révéler un autre ?

regardez !

éblouis

loin des ventres emmurés

des cris cadenassés

des scalpels intérieurs

les rues

se sont figées

sous l’effet de l’exil,

tout s’immobilisa,

l’oracle du soleil

jouait l’obstacle latent. (L’obstacle latent)

Lointitude, oui, c’est une grande aventure poétique. A y entrer le cœur ouvert, à en sortir pour y rentrer encore et encore autant de fois que faim et soif, en se reposant sur la suspension jubilatoire d’un instant « plein, comme une miche de pain » :

Le silence est là, lumineux.

Onctueux comme une pente douce. (Plénitude)

A y rester, au bout du souffle, en s’abandonnant  à la « densité de quiétude (…) garante du plein. Et du vide », jusqu’à ce qu’on fasse sien le paysage lunaire et pourtant chaud de ce dedans magnétique, et qu’on s’imprègne dans son être de cette matière poétique diamantine :

La totalité de ce qui

fut émané

se brise

sur cette densité aussi

dure qu’un noyau de

diamant,

qu’une carapace d’acier,

qui jamais

n’offrira de failles (Dedans).

Patricia Laranco, une voix singulière, à ne pas manquer dans le concert de la poésie contemporaine.


Dana SHISHMANIAN

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11 avril 2010 7 11 /04 /avril /2010 13:18

Situé dans le Nord-Est du Brésil, dans l'état de Piaui, le Parc National de La Pedra Furada est une gigantesque mine de peintures rupestres qui a révolutionné les idées des préhistoriens sur l'art rupestre et sur la nature (origine, ancienneté) du tout premier peuplement des Amériques.

Il fut découvert dans les années 1970 par une femme, l'archéologue franco-brésilienne Nied Guidon, qui nous servira de guide tout au long de ce documentaire. Septuagénaire à la personnalité visiblement très forte, Nied Guidon arpente encore allégrement la brousse brésilienne du Nordeste en quête d'abris sous roche nouveaux.

Rien ne semble en mesure d'arrêter la passion et l'énergie exceptionnelles de cette petite femme ronde à la chevelure touffue et argentée, au parler extrêmement direct, aux manière ouvertes, sympathiques, qui, presque d'emblée, réussit à rendre son centre d'intérêt "contagieux".

Entrant aussitôt dans le vif du sujet, elle nous sert une comparaison qui assimile  La Pedra Furada à une immense "bande dessinée", car il est un fait que ses peintures rupestres "racontent" bel et bien "des histoires". Les scènes qu'elles représentent sont (quoique assez schématiques) suffisamment parlantes pour qu'on en soit sûr : elles figurent des coutumes, des rites, des jeux et des scènes quotidiennes détaillées, voire crues, telles des accouchements ou des relations sexuelles où l'on remarque un homme doté d'un phallus démesuré. C'est avec force que Mme Guidon, qui s'exprime en français, souligne la "richesse des formes d'humains, d'animaux et des thèmes", lesquels "durent pendant des millénaires", ce qui est, en soi, fort remarquable.

Remarquable aussi, nous l'avons déjà souligné, l'abondance des sites. La chercheuse s'attarde sur l'un d'eux, en martelant qu' "il y a 1000 figures" sur ces seules parois.

Lorsque le CNRS effectua la datation de ces gravures, il tomba sur un verdict qui ne put que frapper de stupeur l'archéologue elle-même : 25 000 ans ! "C'était impossible", s'exclame-t-elle encore, émerveillée - et il y a de quoi.

750 m2 ont été fouillés à ce jour.

Les strates d'occupation humaine les plus anciennes remontent à 58 000 ans.

Je vous laisse le soin d'imaginer le bouleversement que ce scoop occasionna dans la grande tribu des archéologues. N'ayons pas peur des mots, la très latine Nied Guidon prononce celui de "cataclysme" !

Les plus atteints par l'onde de choc furent les spécialistes américains : ces yankees virent d'un mauvais oeil qu'on ébranle leur conviction bien ancrée que le tout premier peuplement du "Nouveau Monde" datait seulement de 13 000 ans, et qu'il avait consisté en une migration via le détroit de Behring emprisonné  en ce temps-là dans les glaces, de populations asiatiques sibériennes.

Qui se serait attendu à une présence humaine si ancienne sur le sol du continent ?

Et, mystère bien plus grand encore, d'où ces Hommes, ces chasseurs-cueilleurs tailleurs et polisseurs de pierres , pouvaient-ils bien provenir ?

On a, à ce sujet, à l'heure qu'il est, tout lieu de conjecturer qu'ils sont d'origine africaine (leurs crânes et leurs faces présentent des traits "négroïdes" * )  et auraient pu migrer en franchissant (mais on se demande comment, à une époque si reculée) l'Océan Atlantique.

Nied Guidon s'attarde sur un autre site, celui dit "Pedra Furada I". Associé à une fourchette de datation située entre 5 000 et 42 000 ans, il est riche en éclats de quartz et quartzite (galets) élaborés sur place, puis ensuite abandonnés là, sur "ce qui était des lieux de pêche, de chasse et de peinture".

L'université française de Nanterre l'a bien confirmé : "ces pierres ont bien été taillées par l'Homme il y a de ça 100 000 ans", pavoise l'archéologue .

En 1991, l'ensemble de l'immense site brésilien s'est vu classé par l'UNESCO, avant de devenir, trois ans plus tard, un parc national du Brésil.

"Ici, insiste Nied Guidon, on découvre chaque année de nouveaux sites".

Ce qui n'empêche que les sites sont connus depuis longtemps par la population locale, qui est souvent mise à contribution par les équipes de fouilleurs pour le "minutieux travail à la truelle".

Un exemple nous en est vite fourni, celui d'un abri sous roche découvert en 1975, où figurent des peintures remontant à 8 000 ans, parmi lesquelles "un très beau et très grand cervidé" dont le support rocheux s'est, hélas, détaché de la paroi d'origine pour tomber à terre, en morceaux  formant un véritable "puzzle". Il faut de nombreux ouvriers - et de très nombreuses précautions -  pour dégager ces blocs de roche et, surtout, pour les brosser et, de la sorte, faire apparaître la coloration des peintures. La reconstitution des dessins se fait en emboîtant les pans de paroi tombés au sol. Travail ardu.

On constate, sur le site de cet abri, la présence de "nombreux cervidés"; ceci, nous explique-t-on, s'explique par le fait que, voici 9 000 ans, en lieu et place de l'actuelle "catinga" d'épineux, s'étendait une "immense forêt luxuriante", idéale pour une telle faune. Ce qui frappe dès lors qu'on regarde de plus près les cervidés représentés, ce sont les formes qu'ils affichent, "très différentes les unes des autres" (par exemple, les corps "géométriques" côtoient les bêtes aux "ventres arrondis"), de même que le fait que "plus le temps passe, plus les graphismes se complexifient".

Mais, malheureusement, ces trésors courent, à l'heure qu'il est, un très grand risque; Nied Guidon, non sans légitime désolation, met le doigt dessus : "vent, sable et érosion menacent la longévité des sites". Autre menace, non moins négligeable et non moins désolante, celle que font courir les paysans locaux qui, considérant les représentations comme des "peintures d'Indiens", par profond mépris raciste envers les populations autochtones, les détruisent sans état d'âme et menacent les archéologues, qui les gênent. D'où l'inévitable conflit.

Mme Guidon faisant résolument front, en 2004, on frôle l'émeute. L'archéologue nous confie : "ce fut très affligeant pour tout le monde".

"Aujourd'hui, ça s'est calmé", même si des chasseurs tirent toujours sur les pauvres peintures. Le Parc National a été obligé d'engager des milliers de gardiens pour leur protection. Il n'en demeure pas moins que les gardiens attrappent peu de chasseurs (guère plus de trois par jour en moyenne) et en attrappent de moins en moins, pour la bonne (ou plutôt mauvaise) raison que "les chasseurs sont devenus plus prudents".

Passons maintenant à un fléau supplémentaire, contre lequel Nied Guidon lutte sans relâche : les déboisements par les agriculteurs, qui concernent la partie nord de la Sierra Capibara. Ces actions, s'accompagnant de feux de broussailles, mettent le Parc en danger. Avec cela, "une scierie a débité des centaines d'arbres", se voit contrainte de déplorer l'opiniâtre chercheuse, qui ajoute aussitôt : "les paysans, bien que conscients des problèmes, sont prêts à tout pour vivre; il faut déboiser pour planter". A ne pas oublier : nous sommes dans un pays en voie de développement, au coeur d'une région particulièrement déshéritée. Alors, avec le pragmatisme qui la caractérise, Nied a conçu le projet d'employer tous ces paysans misérables et privés d'écoles dans le Parc National qui, affirme-t-elle, "pourrait attirer, par an, trois millions de touristes", ce qui serait une manne. Oui, mais voilà...si l'on veut des touristes en grand nombre, il faut un aéroport, et un aéroport international, rien de moins !

C'est à ce moment que, médusés, on apprend que l'archéologue attend depuis douze ans la construction de l'aéroport de ses rêves, alors même que 21 millions de dollars ont été versés dans ce but par l'état brésilien.

Là encore, nous sommes dans le Tiers-Monde : il faut compter avec les "affaires louches", qui sont loin de manquer. L'argent est détourné et les travaux entrepris ne vont jamais jusqu'au bout. Même si nous écoutons, un court moment, le gouverneur de l'état de Piaui, pointé du doigt, "faire des promesses".

Nied soupire. Elle est fatiguée. Elle rentre chez elle, sous le poids d'une de ses journées plus que bien remplies.

Tous les jours, de 5h à 20h, l'archéologue "va au charbon", et se donne toute entière. La lassitude que reflète son visage amène dans la bouche du journaliste qui la suit une question : "pourquoi voulez-vous rester ?".

Oui...pourquoi rester alors qu'elle pourrait s'octroyer, enfin, une retraîte bien gagnée loin de cette terre  pauvre, rouge, sèche, ingrate en regagnant la France ? Avec son bel accent brésilien teinté de lassitude, la vieille dame tente de répondre : "on a fait un très grand travail; c'est un travail de plus de trente ans. Je ne voudrais pas que ça se perde. C'est l'histoire de l'humanité. C'est l'appel de ces hommes préhistoriques qui me fait rester". Puis, catégorique, elle répète : "on ne peut pas perdre ce patrimoine".

Elle a 75 ans et le Brésil manque tragiquement d'archéologues. Infatigable en dépit de ses quelques moments de baisse de tonus qui la rendent pensive, cette femme de tête et d'exception, si vivante, crée la FUNDAM, une école d'archéologie où des jeunes prennent la relève.

Fréquemment comparée à l'Abbé Breuil et, surtout, à Indiana Jones (en raison de son côté pionnier, de son esprit acharné d'aventure), Nied Guidon , vous vous en doutez,"n'est jamais bien loin des étudiants qui piochent". Ainsi la voyons-nous tourner autour d'un lieu de fouille, qui vient, comme elle nous le dit si bien, toute excitée, de révéler "un foyer, avec pierres, concentration de charbon et cendres. Un sol très fréquenté".

Nied se montre, comme on s'en doute aussi, très exigeante avec ses élèves, auxquels elle dispense des cours en plein air. Grâce à ces derniers - qui, par ailleurs, sont tous originaires de la région - "la continuité est assurée", ce qui représente un grand facteur de satisfaction et de soulagement pour la chercheuse.

Nied, force est de le constater, ne se lasse jamais des découvertes, et leur caractère inépuisable n'a pour effet que de la stimuler.

Elle nous claironne qu'en 2006, ses élèves ont fait une "incroyable" trouvaille : "les restes d'un crâne humain accompagnés de deux dents de cervidé typique des forêts humides, dans une concrétion calcaire".

"Le squelette était tout fragmenté", mais la datation des calcaires fut parlante : 25 000 ans. Celle des deux dents accompagnant le crâne montait, elle, à 37 000 ans. "Les plus anciens de l'Amérique !" s'exclame Nied Guidon tout fièrement. Puis elle conclut en réitérant : "c'est la plus vieille peinture du monde" (en effet, l'université de Saô Paulo la fait remonter à 35 900 ans, ce qui dépasse en ancienneté celle de Chauvet) et en s'émerveillant encore à la pensée qu' "il y a trop de sites".

Trop de sites ? Sans doute. Mais pourquoi ?

Elle ne tarde pas à répondre, et sa réponse n'est pas moins fascinante que tout ce qui a précédé; "ils sont arrivé très tôt", rappelle-t-elle, ce qui leur a donné tout le temps de s'implanter, et de s'étendre, sur un sol encore tout à eux.

On reste admiratif devant le rapport, si familier, qu'entretient Nied avec ces mystérieux chasseurs-cueilleurs  du fond des temps, pour qui elle a tout sacrifié. Cela ne s'appelle-t-il pas de l'amour ?

 

 

P.Laranco.

 

 

 

*  J'ai appris cela voici plusieurs années, en regardant un autre documentaire; on y présentait une reconstitution faciale d'après un des crânes trouvés sur le site et on l'y baptisait "La première américaine".

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11 avril 2010 7 11 /04 /avril /2010 09:52

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                                        Dessin de P.Laranco.

 

 

 

 

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11 avril 2010 7 11 /04 /avril /2010 08:31

Bonjour,

IDÉES POLITIQUES 

Culture politique à Maurice

1ère conférence-débat – Histoire coloniale, mémoire(s) et construction nationale à Maurice

Jeudi 15 avril 2010

 

 

 

Salle du Conseil de la Mairie de Port-Louis de 17h à 19h

 

 

Catherine Boudet, chercheuse en Sciences politiques et journaliste.

 

  

A Maurice, il n’y a pas qu’une seule façon de voir l’histoire. Car cette histoire est le produit de différentes migrations : celles des colons, des esclaves, des engagés. En conséquence, plusieurs registres de mémoire co-existent, voire se concurrencent. Or, pour construire une nation, l’émergence d’une mémoire collective est un passage obligé…

 


--
Université Populaire de l'Île Maurice (UPIM)
email : upmaurice@gmail.com
site web : http://www.upim.info
Tél. : Annick au (00.230) 701 3587
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10 avril 2010 6 10 /04 /avril /2010 11:09

shiva 005                                                                      

 

 

 

 

 

 

 

 

Acrylique sur panneau de contre-plaqué de Patricia Laranco.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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9 avril 2010 5 09 /04 /avril /2010 12:26

La vanité.





La vanité

qui te fait aveugle à tout point de différence

parce tu crains, plus que peste, qu'on te taxe de non-savoir


la vanité

celle qui te retient d'apprendre à mieux connaître

parce que tu pars du principe - si présomptueux - que tu SAIS


la ridicule et lamentable vanité qui te maintient

au bout du compte inerte, car embastillé dans ton ego.


La vanité

ce misérable et fatal cancer de l'esprit

qui finit par tout envahir, tout enserrer dans ses réseaux

comme les lianes de la jungle étreignent les temples des Khmers

ou des Mayas oubliés, cette vanité qui t'appauvrit

alors même que tu es persuadé qu'elle t'augmente, te sert !

 

 

Patricia Laranco.

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9 avril 2010 5 09 /04 /avril /2010 09:02

TERRITOIRE DU POEME
( Fondé par Anne Stell * Animé par Christian Deudon )


Présente


« IMPROMPTU COULEUR FEMMES »
Avec
ELIANE BIEDERMANN, PATRICIA LARANCO
et
JEANINE SALESSE
***
( Lectures par Suzanne Le Magnen et Christian Deudon )
Le Vendredi 16 AVRIL 2010 à 15H30
***
A LA BRASSERIE « LE FRANCOIS COPPEE » ( 1er étage)
1, Boulevard du Montparnasse, Paris
Métro Duroc
CONSOMMATION : 6 Euros

******

 

 

 

 

 

 

Puis,


Vendredi 21 Mai 2010
« La Femme et les visages de la femme »
par
FRANCINE CARON

***


et
Vendredi18 Juin 2010
« IMPROMPTU INCOGNITA* »
par
BRUNO DOUCET et MICHEL VALMER
*(Revue des éditions Le Petit Véhicule de Luc Vidal)

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