ABSENCE.
On dit toujours de quelqu’un qu’il a de la présence.
Pourquoi ne dit-on jamais qu’il a de l’absence ?
Car de l’absence, au fond, nous en possédons tous. Cela devrait être reconnu comme une qualité.
Nous vivons dans l’instant, précaire et provisoire. Toujours tourné vers sa propre dissolution. En un sens, perpétuellement absent à lui-même.
Sans sa part d’absence, le présent existe-t-il ?
L’instant commande, car nous y sommes immergés. Que nous le voulions ou non, c’est lui qui mène la danse. Or, c’est bien connu, il ne reste pas en place.
Tout est mouvement. La seule présence est ce qui bouge. Ce qui s’étire, tel un élastique, vers l’avenir. L’instabilité est négation de la présence.
Conclusion : avoir de l’absence, c’est exister.
Moi, je n’ai pas du tout honte de mon absence. Mieux encore : ma désertion, je la revendique.
Car c’est en désertant, en me désertant, que je suis. C’est dans cette évanescence translucide et mobile que j’identifie la quintessence de mon être.
Ne sommes-nous pas tous faits d’hémorragie, de fuite ?
Notre ubiquité ne nous absorbe-t-elle pas, ne nous absente-t-elle pas ?
